#5 Back to basics ?

Les temps incertains ont tous cela en commun : ils nous poussent à nous réfugier dans ce qui nous est familier.

Retour de Donald Trump à la tête des USA, retour de la Nintendo 64, retour de Mike Tyson sur le ring… pour se souvenir que nous allons bientôt passer en 2025, il suffit de vérifier le prix d’une baguette de pain.

Pas de panique, elle est toujours à 1€40 contre 4F (0.61€) en 1997.

La question est cependant légitime, tant la moisistalgie bat son plein. Compréhensible “quand on voit ce qu’il se passe”. Et StoryPunk n’échappe pas à la règle. Enfin, plutôt votre servante.

Mais entrons dans le vif du sujet, voulez-vous ?

🐈‍⬛Le rebranding de Jaguar fait sacrément parler !

Si vous avez raté cette information capitale, c’est que vous ne travaillez pas dans le marketing et ne trainez pas sur X. Vous êtes donc encore en pleine santé mentale, mes félicitations.

Ça a fait grand bruit semaine dernière, mais la marque de voiture de luxe Jaguar a annoncé la refonte complète de son identité de marque.

Un mot d’ordre, donc : ne copier personne.

Une baseline qui fait ricaner sur X, car la marque est accusée d’être devenue woke.

Certains proposent même de “fixer” ce rebranding considéré comme raté :

En cause ? Le changement du logo, des couleurs très fashion compatibles et surtout : un panel de modèles inclusifs qui éclipsent complètement les voitures.

Mais concrètement, que s’est-il passé ? Eh bien… pas grand-chose. C’est avant tout beaucoup de teasing. Okay, la marque a communiqué sur son nouveau logo et certains de ses éléments de langage.

Elle s’est aussi fendue d’une vidéo qui reprend cet univers graphique sans nous indiquer réellement dans quelle direction elle va, si ce n’est, d’après elle “a new era” :

Mais… c’est à peu près tout. La marque nous donne rendez-vous le 2 décembre à 20h, heures US EST) pour nous présenter “Copy Nothing”. En attendant, ça brame dans les chaumières, comme vous avez pu le constater.

🔎 Mais qu’en est-il, alors ? Que nous prépare Jaguar ?

Ce sont des conjectures, mais, personnellement, j’y lis deux scénarios possibles.

✅ Option 1 : Ils sont sérieux.

Jaguar a vraiment décidé de changer de cap, revenant sur une esthétique rétro-futuriste qui n’est pas sans rappeler leurs débuts. C’est-à-dire des couleurs, des lignes rondes et profilées, des looks atypiques et assumés.

Ils sortent des clichés automobiles habituels et entrent dans le domaine de la marque de luxe / accessoire de mode chic. Après tout, la voiture a pu incarner la position, la découverte, la richesse et la puissance sexuelle, elle peut tout à fait être une identité à part entière. Et en ce sens, le teaser serait très clair.

D’autant que, contrairement aux critiques, “copy nothing” s’applique très bien dès lors qu’il est question de remettre de la couleur et de ne pas embrayer (vous l’avez ?) le pas des publicités autour de la question environnementale.

Car, et c’est peut-être ce qu’il manque à beaucoup d’analyses, mais Jaguar compte bien ne proposer QUE des voitures électriques dans le futur.

Ce qui m’amène à vous proposer cette grille d’analyse pour leur identité :

• Un décor “martien”, signe qu'on est sur une conquête spatiale,

• Avec des individus au look “space” qui rappelle ce qui se faisait au cinéma dès qu’on parlait de SF et d’aliens,

• Une police d’écriture qui n’a rien à envier à celle du film DUNE.

Pour moi, le message est clair : Jaguar débarque d’une autre planète et nous n’en sommes qu’au premier contact. Maladroit, cryptique, fait de rupture et de rejet de la différence. Je m’attends presque à ce que le 2 décembre prochain soit une sorte de lancement orchestré digne de la NASA avec une narration autour d’une rencontre du 3ème type.

En fait c’est même pas moi qui le dit. C’est l’ensemble de leur communication actuelle :

Défendre l’originalité : Jaguar collabore avec un collectif de créateurs originaux issus de divers domaines artistiques. Pour explorer de nouvelles perspectives. Pour défier les limites. (extrait du site officiel)

❌ Option 2 : Ils nous trollent & ont beaucoup d’argent magique…

Parce que ça coûterait quand même très cher de créer tout ça, juste pour le (bad)buzz. Mais pourquoi pas ? Le monde se gorafise tellement…

C’est en tout cas une idée qui commence à faire parler d’elle, notamment sur LinkedIn :

Personnellement, je trouverai cette explication aussi fumeuse qu’un vieux twist de série façon “et en fait, tout ça n’était qu’un rêve”. Si troll il y a, c’est plutôt du côté des CMs en tout genre !

Burger King, toujours poussé par l’agence BuzzMan a dégainé comme à son habitude :

Mais, définitivement, je trouverai ça vraiment inintéressant. On perd souvent de vue qu’un rebranding ne se fait pas seulement pour le plaisir. Or, Jaguar a l’intention de se positionner exclusivement sur l’électrique. Et qui on trouve en opposant principal ? Tesla.

Tesla qui a, elle aussi, un alignement très “spatial”, mais qui est portée par une des principales figures du gouvernement Trump et autres mouvements “masculinistes”.

En d’autres termes, et ce n’est que mon humble avis, Jaguar a bien l’intention de prendre les parts de marché restées libres, précisément parce qu’il y a des gens qui se refusent à consommer Tesla à cause de Musk.

---

💫 En parlant de rebranding et de retour aux sources…

Vous l’aurez noté, mais StoryPunk aussi fait peau-neuve. L’occasion pour moi de vous expliquer tout ça.

Lors de la dernière édition de la newsletter, je vous ai demandé si vous vouliez me voir plus souvent (oui à 57% - vous êtes 7 à avoir voté…). Si vous vouliez des éditions plus courtes (non à 75% - je suis ravie de savoir que vous avez envie de contribuer ALORS !) et si vous étiez prêts à ce que l’identité de la newsletter se détache de la mienne (Oui à 71%).

Alors, voici pourquoi :

Le nouveau monde de personal branling m’a vraiment rebutée. Avec lui, il charrie les tonnes de selfies bouche-cul-de-poule et pose-de-queen-t’as-vu. Cette ère définitivement “post-narcissique”, qui chevauche allègrement celle de la post-vérité, ne me convient pas.

Je ne me reconnais pas dans ces postures. Ni dans cette façon de communiquer.

Je viens d’Internet à la base. Pas du Web. Encore moins du Web 3.1.1.1[…]x

Je viens d’une époque où on écrivait sous pseudonyme en prenant le temps de réfléchir et d’échanger. Où on ne passait pas son temps à poster toutes ses réalisations (monétisées) pour construire une image publique.

Tout ça sent un peu le discours de boomeuse avant l’heure, c’est vrai. C’est bien pour ça que je n’ai pas non plus envie de tourner en boucle sur mes réseaux en râlant à ce sujet.

StoryPunk m’a rappelé que le travail de vulgarisation peut toujours se faire à l’écrit sur des temps longs. Et c’est bien pour ça qu’en plus de la newsletter, lancé un site dédié.

Storypunk.me

Pourquoi ? Pourquoi faire ça alors que tout se fait sur Tiktok ? Pourquoi parler d’agence virtuelle ?

• Pour centraliser tout ce que je sais et trouve sur le storytelling à un endroit pour aider les gens.

• Pour aider ceux qui veulent travailler avec moi ET avec d’autres talents à le faire autour d’un même projet.

• Pour offrir un VRAI blog sur le sujet du storytelling et du branding.

Vous saviez que j’avais fait un carrousel sur une marque de luxe qui vend de l’eau des glaciers ? Non ? Normal, les réseaux sociaux n’ont aucune mémoire. Et, n’en déplaise aux forcenats de la vidéo et des lives “moi je” (j’en ferai, rassurez-vous !), il y a encore beaucoup de personnes qui ont besoin ou envie de lire. Cette newsletter en est un peu la preuve…

Alors, voilà, moi aussi j’en reviens à mon ADN originel : le blogging et les analyses.

---

🐙 Petite leçon de storytelling avec Disney

D’ailleurs, si vous avez la flemme de lire l’article dédié sur le site de StoryPunk, je vous en fait ici un bref résumé.

Disney a déjà sorti son spot de Noël, et il est signé Taika Waititi à la réal’, et agence adam&eveDDB en production.

Qui de mieux que Disney pour nous raconter des histoires ? La firme applique stricto sensus la définition commune du storytelling en nous proposant en guise de spot publicitaire son “Holiday Short”. L’histoire d’un garçon et d’une pieuvre qui se lient d’amitié et découvrent le monde.

Pour la faire courte (sinon, lisez mon article), Disney y distille subtilement (non) ses valeurs tournant autour de la créativité, de la curiosité, du pouvoir des imaginaires et de l’amitié. Ils auraient cependant pu donner une grille de bingo à cocher pour les pros, où le jeu serait de voir si on a toutes les références…

Mais vous pouvez toujours me les lister en commentaires…

---

🏎️ D’ailleurs, en parlant de rêves d’enfants, Alpine passe la seconde

(Non, je ne me lasse pas de mon humour)

Qui dit nouvelle Alpine (électrique), dit nouvelle campagne. C’est l’agence BETC Étoile Rouge au volant.

La signature : L’Irrésistible Attraction de la Légèreté

Avec les majuscules, oui oui. Ici, on joue sur la promesse du rapport poids/puissance du véhicule, dans une baseline qui ne sait pas si elle doit être bateau ou spatiale. Oui, je juge. Franchement, même Jaguar avec son côté Apple sur le retour me fait plus rêver.

Mais du rêve, il en est question, justement. Le spot nous raconte que les enfants ne rêvent plus, qu’ils ne veulent plus être adultes. Parce qu’il paraît que c’est nul, qu’on n’a que des factures, etc. Enfin, c’est Clitorine, Enguerrand, Marcellin et consorts qui nous le disent. Dans leur microcosme fantasmé ultra-bourgeois, ces braves petits nous racontent qu’ils ne veulent plus grandir, jusqu’à ce que Lucas, 35 ans réponde :

“C’est vrai, mais nous, on a le permis de conduire.”

Et le voilà en train de partir à toute berzingue sur l’autoroute des clichés publicitaires automobiles. La chanson Initials B.B. de Gainsbourg en fond.

L’idée est bonne, le résultat est surprenamment tiède. De quoi se demander si ce spot n’est pas le fruit d’une décision prise par “La Direction”. Si c’est le cas, courage, les créas.

---

🪮 Chez Franck Provost aussi on coupe dans les budgets crea ?

L’agence McCann Paris et Franck Provost se sont associés pour un spot “naturel”. Enfin, non, ils ne le disent pas comme ça… C’est d’ailleurs dommage, ça aurait été plus percutant selon moi :

J’imagine sans mal la réunion :

“Bon, on fait quoi pour la nouvelle campagne Franck Provost ?
- On pourrait prendre une actrice et lui faire…
- Déjà fait. Kevin, quelque chose ?
- Et si on se positionnait sur le côté coiffage professionnel, mais à la maison ?
- Hmmm, ouais, pas mal… Autre chose, Géraldine ?
- On pourrait recruter Audrey Fleurot et aller chez elle ! C’est une star ! Genre, les coiffures de stars, mais à la maison !
- On tient un truc, là… Mais j’veux de inattendu, du changement !
- On fait genre on tourne à l’improviste chez elle, genre on débarque chez la cliente pour lui apporter un soin capillaire de pro ?!
- Oui ! C’est bon ça, Kevin !
- Et… Et on dira sur les réseaux sociaux qu’elle n’avait vraiment pas le texte, même si au vu du spot ça semble plus qu’improbable.
- OUI ! AH JE DIS OUI ! Aaaah… J’sens qu’on va tout décoiffer cet hiver.
- Ah-ah, mais que vous êtes drôle Jonc-Luc !”

Quel fifou ce Jonc-Luc, quand même…

---

👋 Et ça sera tout pour cette édition !

Parce que j’ai déjà beaucoup parlé… Et que j’aimerais pouvoir vous retrouver avant Noël.

J’aimerais bien avoir votre retour sur les changements autour de la newsletter, ou autres.

Avant de vous quitter, sachez que vous pouvez également retrouver StoryPunk sur BlueSky (le concurrent direct de X), où je partage évidemment des articles, des threads prints et légers et où on peut papoter :)

D’ici la prochaine édition, faites-moi savoir que vous me lisez et soutenez ce travail en laissant un like et un commentaire !